Vous ne me croyez pas
Et pourtant j’ai raison
Cet enfant que j’étais
N’en démordra jamais
C’est aussi un pays
Qui vous meuble le cœur
Un pays merveilleux
D’enfance émerveillée
Il suffit d’un seul mot
D’une
sensation qui passe
Et je sens sous mes pieds
Le sable de Langoz
Me reviennent aussi
Les ombres du sentier
Qui menait à la plage
Et je sens sur ma peau
Le maillot tricoté
Quand on sortait de l’eau
Si l’on n’y crochait pas
Devinez, devinez…
On avait des chaussettes
Quand on arrivait tôt
Cette grande impatience
Deux heures médicales
Avant le grand plongeon
Dans la mer parfois fraîche
Mais parfois seulement
Lorsque je prends la main
Des
mes petits-enfants
Me revient en mémoire
Celle de mon grand-père
Corentin protecteur
Quand nous allions au phare
Où il laissait toujours
Sa tente bayadère
Qu’il montait sur la plage
Pour
pouvoir mettre à l’ombre
Sa Titine Corentine
Et bien des bigoudènes
Qui n’avaient pas envie
De bronzer de la coiffe
Les courses chez Marjannic
Ma grand-mère oubliait
Toujours une chose ou l’autre
Mes jambes m’y portaient
Deux ou trois fois par jour
Une boutique sombre
Qui sentait l’outre-mer
Marjannic sous sa coiffe
Prêtresse de son
temple
Et reine en son royaume
En sabots de duchesse
Une livre ça ira avec toi mon petit ?
Et Marie à l’école
Même âge
et même coiffe
Qui couvait de tout cœur
Tous ses ar re vihan.
Il me suffit d’un souffle
Une odeur un reflet
Et je suis à nouveau
A l’anse de Rosquerno
Je suis sûr que le vent
A gardé souvenir
De nos éclats de rire
La joie qui éclabousse
Mes
cousins ma cousine
Comme les doigts de la main
Fermée sur le bonheur
Des étés partagés
Qui s’impriment à jamais
Dans la mémoire
bleue
Avec comme repères
Les tentants tas de maërl
Sur le quai Saint Laurent
Un Pen-Glaouïc serein
A l’aise sous ses algues
Il suffit d’un rocher
Pour prendre le chemin
Vers
la beauté du monde
Je l’ai vu surmonté
D’une sirène blonde
Vêtue de ses cheveux
Vous ne me croyez pas ?
D’où sort la
vérité,
Je vous le redemande ?
On suivait le chemin
Des chevaux de halage
Jusqu’à la Maison Blanche
La porte des possibles
Frontière du mystère
Offrande d’horizons
Savez-vous ce que c’est
Que cette odeur de pins
Des beaux soirs de juillet
Odeur de plénitude
Odeur indispensable
Au vrai bonheur du jour
Savez-vous ce que c’est
Que l’odeur de rivière
Que le paysage invente
Alors qu’on sait très bien
Que c’est de l’eau de mer ?
Riez si vous voulez
Mais ne reniez jamais
Les avenirs
d’enfance.